• Seuils : Les trois grandes formes de République .

    http://amitie-entre-les-peuples.org/spip.php?article1666

     

    * Les variations sur les grands principes.

    Les principes républicains de liberté, égalité, fraternité (1) ne sont pas hors de la lutte sociale sous des formes diverses . Ils ont fait l’objet d’ajouts comme celui de laïcité mais aussi d’autres plus contestables et d’interprétation qui tendent à donner une certaine couleur à la République.

    Le liberté, égalité, fraternité peut virer au "travail, famille, patrie" et la République devenir coloniale dehors et exploiteuse en interne.

    Si pour certain la vraie république porteuse d’émancipation est sociale et même socialiste il faut se souvenir que pour d’autres - SFR par exemple(2) - elle ne saurait qu’être libérale et capitaliste. Dans un conflit de SFR contre le syndicat SUD, SFR tirait argument de référence à l’autogestion socialiste dans les statuts du syndicat pour signifier qu’il n’était pas républicain. Pour les capitalistes la République défend d’abord le droit de propriété et liberté d’entreprendre alors que ces droits certes constitutionnalisés sous la V ème République n’ont jamais fait partie des "valeurs républicaines ».

    Il ne s’agit pas ici de mesurer l’écart entre les Républiques réellement existantes et la ou les Républiques théorisée(s) notamment par rapport à la question coloniale ou à celle du racisme. Il s’agit de procéder à des distinctions en rapport à la démocratisation, aux droits sociaux et à la perspective socialiste. Ce texte complète celui-ci : "Les cercles de l’émancipation par la démocratisation"

    Les droites passées à la République dans la France de la fin du XIX ème siècle vont tendre à promouvoir une liberté des puissants qui va dissoudre la dite République dans un libéralisme destructeur. C’est la critique faite depuis longtemps déjà par Madeleine Rébérioux et d’autres.

    * Distinctions sur la République.

    Mais les distinctions à former sur la République tendent ici à se dégager (un peu) de l’histoire française et portent plus la marque d’une perspective marxiste et altermondialiste plus généralisable qui prend en considération tout à la fois les processus d’intervention des peuples-classe - en plus (extension) ou en moins (rétrécissement) - et donc les grands niveaux qualitatifs de démocratisation et socialisation d’une société donnée.

    Il n’y aurait alors pas qu’une République qui serait "la République du centre". C’est ce que défendaient les solidaristes de la III ème République française derrière Bourgeois, Bouglé, etc pour s’opposer sur leur droite aux monarchistes et aux libéraux et sur leur gauche aux marxistes divers et aux communistes. Si la République présente certaines caractéristiques qui l’oppose au royalisme qui pose des sujets contre les citoyens et aux dictatures théistes qui place la volonté divine à la racine des modes de gouvernance, il faut bien remarquer que dans son spectre élargi elle peut prendre plusieurs formes.

    Ici il s’agira donc d’offrir une modélisation générale sous forme de triptyque : libérale, sociale, socialiste. C’est qu’il y a plusieurs façon d’accommoder les grands principes républicains : liberté, égalité, fraternité, laïcité (1 ).

    Il y a aussi la distinction "République jacobine" qui lutte contre la féodalisation territoriale et les inégalités mais par un centralisme excessif et la "République décentralisée" qui peut accompagner un développement inégal et combiné du capitalisme fort préjudiciable à la République .

    Il y a aussi sous couvert de République une tentative d’ homogénéisation culturelle au profit de la culture dominante et au détriment des cultures dominées dites régionales. Mais respecter une certaine diversité culturelle des différentes régions ne signifie pour autant effacement du cadre national dans d’autres aspects importants, ceux qui via les services publics permettent d’éviter la fragmentation et les inégalités entre régions.

    * Les trois grandes formes de République.

    La République libérale s’emploie à restreindre la vie démocratique - entendu comme mode de décision, d’interpellation et d’intervention du peuple - ainsi que les droits égaux au profit de la gouvernance et de la marchandisation. La République libérale s’accompagne d’un rabougrissement démocratique et d’une montée des inégalités du fait de la libéralisation du marché et de ses principaux acteurs, les firmes multinationales. La République libérale peut aisément dégénérer en République nationaliste ou ethnique si la référence républicaine au "démos" (citoyen) s’efface devant l’ethnos, un ethnos catho-laique par exemple. Le nationalisme se tourne vers l’extérieur contre l’étranger stigmatisé et vers l’intérieur contre les minorités nationales . Elle peut connaitre aussi une pente "césariste démocratique" ou "bonapartiste".

    La République sociale étend et approfondie la démocratisation tout en maintenant une large place au marché. Elle généralise cependant le principe d’égalité des droits comme l’indique Pierre Ruscassie dans "Démocratie contre nationalisme" et ce faisant elle augmente le champ des services publics avec un contenu plus important de satisfaction des besoins sociaux, ce qui fait que les missions publiques d’intérêt général ne semblent plus être une politique de détournement des missions politico-administratives au profit des entreprises capitalistes et du marché . La République sociale fait aussi jouer à la fiscalité un rôle redistributif du haut vers le bas qui marque un changement conséquent avec la République libérale. Elle défend la Sécurité sociale. Bernard TEPER (UFAL) en fait même un repère fondamental de sa caractérisation mais cet auteur se revendique d’une définition proche de Jean Jaurès aisément mobilisable en France pour un projet de gauche mais qui n’est pas exactement celle ici évoquée.

    Dans cette perspective, la République socialiste n’est que la suite de la République sociale dans la mesure ou elle monte d’un cran qualitatif la socialisation et la démocratisation de la République sociale. Mais en fait elle opère une rupture franche en cassant la domination du capital et en assurant ainsi le dépassement effectif du capitalisme. Elle réalise le saut du système d’alternance institutionnelle au sommet à celui de l’alternative globale au sein de l’Etat et de la société civile clivée par les rapports sociaux. Une telle rupture ne se remarque pas qu’en interne. Aller vers le socialisme c’est aussi rompre avec la domination impérialiste et néocoloniale en externe.

    *

    Le socialisme ne se définit pas seulement par la collectivisation des moyens de production. On dirait aujourd’hui avec Yves Salesse appropriation sociale. Elle une dimension "démocratie poussée jusqu’au bout". Non seulement l’écart entre les citoyens et les élus sont réduits mais les rapports démocratiques entre dirigeants et dirigés sont radicalement transformés. Les rapports marchands fondés économiquement sur la solvabilité et juridiquement sur le contrat sont réduits par la logique de service public qui met en place par la loi la péréquation tarifaire

    Christian DELARUE avril/mai 2011

    1) Le "carré républicain" : Liberté, Egalité, Adelphité, Laïcité. http://amitie-entre-les-peuples.org/spip.php?article911

    2) La République et le syndicalisme - Mouvements http://www.mouvements.info/La-republique-et-le-syndicalisme.html

    Eléments sur le socialisme C Delarue

    http://amitie-entre-les-peuples.org/spip.php?article1104

    Néo-solidarisme ou néo-socialisme

    http://amitie-entre-les-peuples.org/spip.php?article707


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    " Dieu est mort " mais il faut toujours " se sauver " !

     

    Christian Delarue

    Il s'agit ici d'une modeste réflexion à partir de Sartre, Fromm et un peu Marx et M Luther-King concernant les relations humaines ici plus que les rapports sociaux.

    1 – "Je suis un homme fait de tout les hommes"

    La fameuse citation de J-P Sartre montre que nous sommes tous face à une tâche importante, avec ou sans " talent " (guillemets de l’auteur nécessaires) : " Ce que j'aime en ma folie, c'est qu'elle m'a protégé, du premier jour, contre les séductions de "l'élite": jamais je ne me suis cru l'heureux propriétaire d'un "talent" : ma seule affaire était de me sauver - rien dans les mains, rien dans les poches - par le travail et la foi. Du coup ma pure option ne m'élevait au-dessus de personne: sans équipement, sans outillage je me suis mis tout entier à l'œuvre pour me sauver tout entier. Si je range l'impossible salut au magasin des accessoires, que reste-t-il ? Tout un homme, fait de tous les hommes et qui les vaut tous et que vaut n'importe qui ".

    La formule de Jean-Paul SARTRE a le mérite de rappeler que nul n'échappe à la dynamique de condition humaine avec ses choix difficiles bien que certains partent dans la vie avec une situation sociale très défavorable. Evidemment des conditions sociales d’existence ou de mal-vie sont déterminantes.

    2 – Un pari vers le bien : " Entreprendre c'est espérer, persévérer c'est réussir. "

    Eric FROMM concevait (voir ci-dessous) clairement l’homme comme de nature intrinsèquement contradictoire. L'homme même déterminé par ses conditions sociales de naissance et d'existence garde une possibilité de se construire à partir de choix ; des choix qui peuvent prendre plusieurs sens . Il dispose en effet d'une part d'une capacité de faire du bien, de prendre soin de l'autre, d'avoir des attentions et des égards pour lui (ou elle). Mais il a d'autre part une capacité à faire du mal à autrui, à le blesser, le faire souffrir.

    Là ou l'on retrouve la formule de Sartre - je suis un homme fait de tout les hommes - c'est que les personnes plutôt intelligentes et gentilles d'ordinaires ne sont pas évidemment pas exempt d'un basculement dans la haine ou le mépris. Fromm, sans se référer à Sartre, précisait que l'homme pouvait pencher vers un côté ou vers l'autre de façon variable selon l'éducation reçue, les conditions sociales d'existence, etc mais surtout en fonction d’une certaine auto-discipline. Plus on " s'entraîne " à être du bon côté et plus c'est aisé d'y rester disait Fromm. Si on y arrive pas seul on peut s'y mettre à plusieurs. Il faut alors choisir ses amis.

    3 - S'obstiner à blesser l'autre de façon répétée c'est risquer une réponse similaire.

    Si comme disait Karl MARX " l'amour engendre l'amour " alors à contrario on peut en déduire que faire du mal à l'autre positivement ou par indifférence forcée (refus de salutation par exemple) c'est risquer aussi en retour que celui-ci vous fasse aussi du mal à son corps défendant. Il faut peut-être alors risquer l’agressivité constructive, biophile disait Fromm qui la distinguait de l’agressivité destructrice. C’est un pari. Rien n’est sûr. Martin LUTHER KING abondait dans ce sens : " L'obscurité ne peut pas chasser l'obscurité ; seule la lumière le peut. La haine ne peut chasser la haine ; seul l'amour le peut. "

    Choisir la voie de la considération mutuelle, du respect réciproque n’est pas aisé. Le faux-pas est possible. La parole doit être mis en application, devenir une pratique. Quand aucune pratique n'est possible l’affirmation de soi devient elle-même une pratique. Ecarter le ressentiment, le mépris et la haine en voyant aussi la face lumineuse d’autrui ambivalent comme soi est sans doute une tâche difficile et plus encore déjouer les manipulations. Rester dans la pratique positive. Si le geste a été mal fait, s'excuser. Recommencer différemment. Si le geste a été mal compris, s'expliquer. Ne jamais renoncer à se faire comprendre. Si la relation est difficile proposer un compromis. Si le compromis ne convient pas en proposer un autre. Salomé indique que l’on est responsable " que de son bout " dans une relation. Pas plus. Pas de toute la relation. Et chacun a un bout qu’il le veuille ou non ! Isabelle Fillozat dans " l’intelligence émotionnelle " lançait des " bulles d’amour " à son contradicteur méprisant.

    La philosophie résumée d'Eric FROMM

    I - Problématique philosophique générale : La critique frommienne des insuffisances de la philosophie classique :

    Est-il possible de parler d'essence humaine, de nature humaine?

    La question se pose sérieusement car pour E Fromm, la conception classique de l'homme pose un dilemme :

    * soit l'homme est une substance . Alors soit l'homme porte le mal en lui , soit inversement il est "homme de bien", mais il ne peut évoluer.

    * soit l'homme est en perpétuel devenir mais il n'a plus de définition.

    * E Fromm propose de sortir du dilemme par une conception dialectique et matérialiste particulière.

    II - La conception d'E. Fromm pour sortir du dilemme : une conception dialectique et matérialiste particulière de l'humain.

    Difficile de résumer plus que dans ces trois points :

    1 - Sa définition de l'humain : il est doublement contradictoire !

    Ce dernier vit en permanence dans une contradiction qui prend racine dans les conditions de l'existence humaine .La contradiction est inhérente à l'espèce humaine.

    - L'homme est :

    * à la fois animal et intelligent

    * à la fois dans la nature et transcendant celle-ci.

    - L'homme est donc souvent en proie à un conflit .

    2 - Choisir la solution positive :

    Ce n'est pas tout de dire que l'homme est dans le conflit, il convient d'indiquer une solution:

    - la solution régressive consiste à rejeter sa part humaine, sa conscience

    - la solution progressiste vise à développer son humanité.

    L'homme doit donc lutter contre les tendances régressives.

    3 - Cette lutte est théorique et pratique, individuelle et collective.

    C'est dans l'Art d'aimer que Fromm explique la double nature - théorie et pratique - de ce combat humain. Outre la théorie il explique surtout qu'il s'agit d'un art, et donc d'une discipline.

    Puisque toute personne, ou presque, est susceptible de régresser dans un état archaïque (*) - même si les plus entraînés " chutent " moins souvent - tout humain, constamment, et quasiment à chaque étape de sa vie, doit faire des choix de développement humain.

    * p 173 de " Le cœur de l'homme "


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