• LE CHOIX ET L’AFFIRMATION DU MEPRIS


    Le mépris n'est pas de la violence ouverte . Il peut être mondain, portée durablement mine souriante ou attristée pour les tiers, selon les
    circonstances. Il use de masques. Il est une force tranquille parce qu'insidieuse. Il est sélectif.


    I – RESSENTIMENT : UNE HAINE QUI MONTE EN FORCE !



    - Un littéraire et un philosophe en parlent : Alberto MORAVIA la décrite entre Riccardo et Emilia dans "Le Mépris". Riccardo doit subir
    l'indifférence des silences et la froideur des regards vides de sa femme Emilia. Pour le philosophe Spinoza le mépris est une forme de haine qui
    consiste à nier autrui.

    - La montée en puissance de la haine : Le mépris peut d'abord se manifester clairement par un discours du dégoût ou de la dévalorisation
    prononcée. Il n’est pas nécessairement accompagné d'insultes et d'injures . Il peut tenir d’abord dans un regard noir, franchement
    haineux puis par la suite dans l’ignorance totale de celui ou celle qui fait l’objet du ressentiment. Cette personne sera alors posée comme
    invisible, inexistante. C’est la néantisation de l’autre.


    II - LE STADE DE LA VIOLENCE DESTRUCTRICE



    Plus que de l'évitement issue d'une crainte - la phobie d'autrui -, le mépris veut la destruction symbolique de l'autre. Pour ce faire, elle ne
    jettera même pas un regard noir, elle vous ignorera totalement. La haine la plus puissante consiste à vous croiser sans vous saluer. Cette
    ignorance totale créé des dégâts psychologiques graves, surtout si cette personne avait il y a peu une grande importance dans votre vie. Cette
    violence n'est pas visible par les proches.

    Le comble de la destruction est atteint quand la question se pose : si je suis méprisé, n'est-ce pas parce que je suis méprisable ? Dans un
    premier temps le méprisé va travailler à sa réhabilitation car il n'y croit pas mais il se rend compte que rien n'y fait. C'est que la logique
    de la haine est incompatible avec celle de la compréhension, de la communication, du compromis, et plus encore avec celle du pardon. La
    haine prends la place de l'amour qui est parti ailleurs.


    III - LE MEPRIS EST CONTAGIEUX


    Le mépris se partage, se répand . Au lieu de créer des ponts et des liens comme l'amour il va créer des fossés et des frontières . Il va
    embrigader des amis afin qu'ils soient plus prompts à sortir le glaive qu'à favoriser les compréhensions.

    Pour que le mépris perdure il ne faut pas rompre le délire paranoïaque il faut au contraire le renforcer et construire ainsi une logique de
    camp. On est pour l'un et contre l'autre !

    IV – QUE FAIRE CONTRE ?

    Lutter contre le mépris passe par la parole qui brise les murs, ouvre les cœurs. Il s’agit de permettre de voir l'autre autrement, de ne pas
    le réduire à son stigmate. C’est le début d’une reconnaissance de son humanité.

    Christian Delarue

     


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  • AUTHENTICITE

    La source qu'il faut atteindre est en nous !

    Tel est le titre de l'entretien accordé par le magazine "Philosophie" de février 2008 à Charles TAYLOR, philosophe canadien spécialiste du multiculturalisme et ici défenseur du concept d'authenticité. Je ne m'intéresse ici à qu'à ce concept d'authenticité, le multiculturalisme étant abordé ailleurs au sein du MRAP notamment. L'authenticité est à ce philosophe ce que la congruence est à certains psychologues. Mais d'autres philosophes défendent encore la vertu contre « l'émotivisme » (sic) ou le sentimentalisme (resic).

    I - Le point de départ de l' analyse de Charles TAYLOR

    La fin d'un monde : celui de la mono-croyance hégémonique. Charles TAYLOR rappelle avec insistance que "le modèle de civilisation à source unique qu'était la chrétienté appartient au passé et qu'il n'est plus possible d'avoir ce genre de morale". La religion n'a pas disparue mais nous vivons désormais avec des droits fondamentaux et des principes démocratiques de liberté, d'égalité et de laïcité (ce que ce canadien oublie). Et quand cela ne suffit plus alors c'est à chacun de chercher sa vérité, le sens de sa vie.

    L'auteur n'est pas pour autant relativiste. Tout ne se vaut pas. Une vie tournée vers l'admiration des vedettes, des grandes fortunes ne vaut pas celle qui prend pour modèle Médecins sans frontières dit-il mais cette supériorité n'est pas à imposer comme norme dans une loi . Si la norme n'est pas celle issue du passé et qu'elle n'est pas non plus dans la loi alors c'est qu'il faut la chercher en soi. L'auteur a démontré par ailleurs (dans "Les sources du moi" ) que c'est l'authenticité qui est au fondement de la culture et de l'éthique contemporaine. Exemple (Pm) : A la question "Diriez-vous que le libertinage est inférieur, comme choix de vie, à une vie conjugale et familiale fidèle et durable?" Charles TAYLOR répond : "Il faut une catégorisation plus fine. Parce que la vie amoureuse est plus compliquée. Il y en a des très volages qui révèlent des liens forts et, à l'inverse, il y a des vies conjugales et familiales qui font surgir des formes de cruauté, écrasant certaines potentialités dans les êtres humains"

     

    II - L'engagement authentique dans la relation amoureuse : un détour via Valérie DAOUST

    Chapître « AUTHENTICITE DE LA PASSION » de Valérie DAOUST (*)


    L'amour devient une chance d'être authentique dans un monde ne général gouverné par des solutions pragmatiques et des mensonges opportunistes : c'est en quelque sorte une nouvelle religion, qui à la fois promet le bonheur, permet d'échapper à la quotidienneté et donne un sens à la vie. (V DAOUST cite ici un auteur qui montre que l'amour possède aussi des caractéristiques qui le différentient fondamentalement de la religion.).

    L'individu romantique, dans ce contexte, doit respecter une règle fondamentale : l'obligation de l'honnêteté. Au risque même de briser ses engagements et l'amour, dès lors, n'est plus le lieu d'une affection partagée, mais celui des peines et des douleurs de l'intimité. L'obligation de l'honnêteté constitue l'authenticité des sentiments exprimés à l'autre et participe à cultiver un rapport à soi-même qui soit véridique.

    Ce n'est pas, comme l'interprète Claude Habib, que nous connaissions aujourd'hui le chacun pour soi, sous le signe d'un individualisme égoïste, qui ne permettrait pas de relations à long terme. C'est la recherche d'une grande loyauté dans l'amour, qui devient un lieu où l'homme et la femme déterminent leur existence et ont l'impression d'agir librement. C'est la référence à soi et jusqu'à un certain point à l'autre, qui rend l'action amoureuse légitime.

    De la même manière, on ne se marie plus pour d'autres raisons que celles qui renvoient à l'amour – les institutions et la tradition, la sécurité économique et la famille sont désormais des facteurs secondaires -, et l'amour qui trahit les engagements et les espérances devient insoutenable.

    Ce n'est pas le fait que l'individu soit devenu un être égoïste qui rend les relations difficiles, mais que l'amour soit investi d'une telle puissance libératrice et transcendante : il est associé à un idéal de liberté, de vérité et d'accomplissement. Autrement dit, l'individu est à ce point romantique, qu'il préfère souvent être seul plutôt que de s'engager dans une relation qui ne correspond pas à son idéal.Cet idéal de la relation amoureuse sous le signe de l'authenticité doit satisfaire à plusieurs impératifs. Elle réclame l'attirance sexuelle, la complicité, qui ressemble à une profonde amitié mais aussi le partage de projets communs, constituant l'histoire romantique du couple, et ou l'enfant peut devenir la preuve de l'authenticité et de la profondeur des sentiments partagés.

    Mais il y a plusieurs manières d'élaborer les scénarios amoureux : les expériences dans la vie de chacun l'amène à adhérer de différentes manières aux principes de l'amour romantique. L'âge de l'individu a son rôle à jouer dans les mises en scènes de l'amour ; les projets et les attentes ne seront pas les mêmes pour l'individu de vingt ans et pour celui de soixante.Quoique les projets et engagements puissent varier, l'amour romantique conservera le caractère de l' « amour confluent », comme réciprocité, et le caractère de l'amour passionnel comme désir à consumer.

    (*) extrait de « De la sexualité en démocratie – L'individu libre et ses espaces identitaires. » PUF 2005.

    Sur Bellaciao lire S'engager pleinement, sans retenue...

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    III - De l'authenticité à la reconnaissance de l'attachement résiduel.

     

    L'attachement n'est pas nécessairement incompatible avec l'amour et l'amitié. Si de nombreux philosophes ou psychologues expliquent à raison que l'attachement n'est pas de l'amour ou de l'amitié de nombreuse personnes ayant néanmoins fait un travail de détachement reste partiellement attaché. Cet attachement résiduel génère de l'attention ou du soin marque de l'amour ou de l'amitié . Nombre de personnes ressentent cet attachement-amitié-tendre de façon authentique (sans être plus "aliénées" que d'autres).

     

    Mais les temps sont "chat" c'est à dire apologétique d'une vision proche de Salomé qui veut qu'il soit bon psychologiquement, moralement voire juridiquement de se détacher aisément, totalement et rapidement. La formule répétée sur le mode vulgaire est : "une de perdue dix de retrouvées !" Si cela ne se fait pas ainsi alors vous êtes passible de l'incompréhension et du soin . C'est donc contre la pensée normative dominante et oppressive qu'il faut s'affirmer "non chat" en considérant bien néanmoins que la pensée de l'indépendance et de l'autonomisation apporte des suggestions pertinentes.

    C'est ainsi, une fraction de l'humanité n'oublie pas - même après la phase de deuil suivant une rupture - les femmes ou les hommes qui ont été enlacées, les êtres chéri(e)s, et ce durablement ou brièvement. Et parfois la douceur de l'étreinte n'est même pas nécessaire pour que la marque soit durable. Et même les personnes - femme ou homme - qui ont durablement échangé des appréciations intimes hors de toute expérience amoureuse laissent parfois en eux des traces durables. Tous ne sont pas "chat"! C'est peut-être une marque de notre humanité. Ce qui ne signifie pas que notre vie soit aussi faite de séparation libératrice. Jacques SALOME s'est fait une vocation de les favoriser.

    Christian DELARUE

     

    voir Les humains ne sont pas « chat » sur ce blog chrismondial

    SALOME > http://www.hikmat.eu/Textes/separations.htm


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  • LA CRITIQUE ANTI-FETICHISTE VA PLUS LOIN QUE LE BLASPHEME
     
     
    I - Un double élargissement de la critique anti-fétichiste dépassant la critique des dieux .
     
    1) Celle qui critique les notions et les processus abstraits
     
    La critique anti-fétichiste dépasse la désacralisation et la critique des dieux monothéistes ou polythéïstes pour porter sur tout ce
    qui s'élève au-dessus des humains : la nation, la rationalité instrumentale dont la quantophrénie du chiffre de B HORTEFEUX est un emblème .
     
    2) Celle qui va jusqu'à critiquer le "fétichisme du moi".
     
    Cette critique peut même aller jusqu'à critiquer, en théorie mais pas à l'encontre d'un individu précis sauf exception, le fétichisme du moi (expresion d'Alain BIHR) . Autrement dit la critique anti-fétichiste autorise une certaine critique de l'individualisme exacerbé, de la personnalisation (dont le blog est une forme) comme du narcissisme humain.
     
    II - La critique du narcissisme selon la psychanalyse culturaliste 
     
    Erich FROMM dans "Le coeur de l'homme" Ed pbp p103 distingue deux formes, bénigne et maligne. Le narcissisme peut être normal : il y a par exemple un narcissisme utile et bénéfique pour se reconstruire après une séparation. Quand au narcissisme "pathologique" il faut en mesurer les degrés. Ainsi on peut avec Eric FROMM (dans le Coeur de l'homme) "établir une distinction entre deux formes de narcissisme - l'une bénigne et l'autre maligne.
     
    - Dans la forme bénigne, le narcissisme a pour objet quelque chose qui a couté à l'individu un certain effort. Ainsi par exemple une personne peut tirer un orgueil narcissique de son activite de charpentier, de savant ou de fermier. Dans la mesure ou l'objet de son attachement est quelque chose qui lui demande un certain travail, l'intérêt exclusif qu'elle porte à sa propre activité et à ses propres réalisations est constamment contrebalancé par celui qu'éveillent en elle l'exécution de ce travail et les matériaux sur lesquels s'exerce son activité.
     
    - Dans les formes malignes (p104), l'individu ne prends pas pour objet de son attachement quelque chose qu'il crée ou qu'il exécute, mais quelque chose qu'il possède, son corps par exemple, ou encore sa beauté, sa bonne santé
    Ainsi, par exemple, se montrer raisonnablement fier d'une performance sportive est-il bien différent d'être fier de ne tomber jamais malade car en général une performance sportive ne s'obtient que par un laborieux travail d'entraînement alors que de ne tomber jamais malade ne provient que d'une qualité de l'etre.
     
    Christian DELARUE


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  • L'AMOUR SOURCE PUISSANTE DE VIE

     

    Si l'amour est tant recherché, si l'on a tant de peine à l'oublier quand on l'a rencontré, c'est probablement, dit Patrick De Neuter, parce qu'il apporte tout à la fois la reconnaissance de soi comme être aimable et, lorsque la sexualité s'y conjoint, la reconnaissance de soi comme être désirable.

    Dans « reconnaissance » il y a « naissance » et les amoureux décrivent fréquemment leur amour naissant comme une naissance, du moins une nouvelle jeunesse. Il est le surgissement miraculeux d'un nouvel élan vital, une découverte d'une partie de soi méconnue ou encore l'ouverture à de nouvelles possibilités créatrices.

    Dire à quelqu'un « je t'aime », sauf en cas de clivage du mouvement tendre et du mouvement sensuel, signifie souvent « je te désire ». Pour Jacqueline SCHAEFFERT (1) : la rencontre d'un amant amoureux effracteur est nécessaire à la femme pour accéder à sa féminité. Et l'homme ajoute Patrick De Neuter ne deviens vraiment homme que s'il rencontre une femme qui peut ainsi l'ouvrir à la plénitude de sa virilité.

    L'importance psychique immense de l'objet d'amour.
    Ces expériences d'amour et de désir amoureux sont d'une importance psychique considérable pour chacun de ceux qui les vivent et l'on comprend que la pulsion d'emprise se développe inévitablement à l'égard de celui ou celle qui en est l'occasion ou la cause. On peut aussi comprendre l'angoisse du déclin et de la fin de l'amour ainsi que celle de l'abandon. La jalousie à l'égard de qui pourrait détourner l'aimée prend ici tout son sens, ainsi que l'extrême dépendance de l'amoureux(se) à l'égard de l'aimé(e).

    1) in « Clinique du couple » ouvrage collectif ERES 2007 actualité de la psychanalyse

    2) in « Le refus du féminin » PUF 1997

    AMOUR : ON EN SE CHOISIT PAS PAR HASARD ! 

    - Selon J.-G. Lemaire, l'idéalisation est le fondement de l'amour :" Il n'y a guère de rencontre amoureuse sans cette forme de surévaluation du partenaire, sans cette euphorie annulatrice d'anxiété. Si l'objet est totalement bon, le sujet aussi est heureux et tout-puissant. " Cette phase qui s'appuie sur le clivage et le déni de la réalité, à la limite du " pathologique ", fait peur à tous les frileux qui redoutent la fusion et diabolisent la passion.
     
    - Ils ne supportent pas de perdre la maîtrise de leurs émotions, mais ils ont tort, précise Alberto Eiguer, psychothérapeute de couple, car cet élan passionnel est une victoire de la libido, une dynamique d'Eros " pour la vie contre la mort, pour la fusion contre la séparation, pour le plaisir contre la souffrance " (3). Toute rencontre amoureuse tend à la fusion avec l'autre. Comme le rappelle Freud, aux prémisses de l'état amoureux, la démarcation entre moi et l'objet tend à s'effacer. Toi et moi ne font qu'un.
     
    http://www.psychologies.com/cfml/dossier/c_dossier.cfm?id=528

     


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  • "CARTE DU TENDRE" ET CHOIX DU PARTENAIRE

    Les deux courants de la "carte du tendre" posent souvent problème mais sont aussi source de joies. La lecture de Colette CHILAND et Danielle BASTIEN aide à comprendre les enjeux de nos rencontres loin d'une idéologie de l'amour désincarné.

    Christian DELARUE 


    1) Colette CHILAND

    Un des thèmes du livre "Le sexe mène le monde" de Colette CHILAND porte sur la "love map"



    Colette CHILAND aborde (1) la question (mystérieuse) du choix du partenaire et son propos est des plus intéressants. Nous ne suivons pas nécessairement les positions de l'auteur sur tous les thèmes abordés par ailleurs mais les précisions fournies sur la "carte du tendre" viennent donner du sens à des comportements courants. Ils ont une portée explicative forte.

    Ses réflexions sont celle d'une psychanalyste, qui rappelle que la sexualité humaine est d'abord une psychosexualité. Au contraire des sexologues, qui traitent les troubles du comportement sexuel, les psychanalystes, en effet, parlent d'une sexualité indissociable du psychisme parce que précisément elle organise celui-ci.

    A propos du choix du partenaire Colette Chiland évoque ici les travaux de John Money, les “sexual maps”, la “carte sexuelle” ou “carte du tendre” qui, comme ne l'indique pas son nom, ne concerne pas seulement l'aspect tendre de la de la sexualité et de la relation sexuelle, mais aussi son aspect sexuel, érotique. Une carte a deux faces donc.

    L'enjeu est double d'une part le "fonctionnement" tendanciellement différent de la "carte du tendre" chez l'homme et chez la femme et d'autre part l'ajustement des cartes dans le choix du partenaire. L'ensemble de la problèmatique de la "carte du tendre" explique la qualité ou l'insuffisance des rencontres de qualité comme les deuils difficiles.

    Ainsi que le remarque Jean-François Rabain (2) Collette Chiliand réconcilie Freud et Bowlby : la satisfaction pulsionnelle cherchant l'objet, la figure d'attachement, et non seulement la pure décharge mécanique. Elle montre, par
    ailleurs, qu'il n'existe pas d'amour aussi bienveillant soit-il qui ne soit mêlé d'ambivalence. L'ambivalence dans son inéluctabilité est pour les freudiens une “conséquence” de la dernière théorie des pulsions, Freud décrivant une force de déliaison à l'œuvre associée à une force de liaison. Face à Thanatos, face aux forces de destruction, Eros, Philia et Agapé “représentent notre espérance”.


    1) Colette Chiland, "Le sexe mène le monde" Éditions Odile Jacob, 1999.
    2) Note de lecture de Jean-François Rabain
    http://www.carnetpsy.com/archives/ouvrages/Items/cp46a.htm

     Pour aller plus loin à propos de la "carte du tendre" comme pièce maîtresse de la relation hétérosexuelle ou homosexuelle:

    2) Danielle BASTIEN

    dans son article "Le scandale du féminin" dans l'ouvrage collectif "Clinique du couple" ERES

     

    "Freud nous invite à penser les courants tendres et sensuels associés chez les femmes et plus volontiers dissociés chez les hommes" écrit Danielle BASTIEN

    Cette observation explique un certain décalage entre les hommes et les femmes dans les rencontres intimes. Cela explique aussi le sentiment intense de bonheur lorsqu'un homme voit s'unifier pleinement sa carte du tendre qu'il avait auparavant plus ou moins clivée. Ce bonheur se retrouve chez les femmes qui connaissent le désir "comme effet d'un amour inaugural"

    Danielle BASTIEN décrit ensuite les différentes formes de dissociation de la plus "soft" à la plus radicale :

    "CHEZ LES HOMMES en effet, pour qui, enfant, la mère à la fois incarne à la fois l'attachement tendre pré-oedipien pour devenir ensuite l'objet visé par le courant sensuel du désir oedipien, ce qui sera la plupart du temps problématique, c'est de voir rassemblés ces deux courants chez une femme : leur épouse, leur compagne, à la fois amante et mère des enfants. Se voit ainsi classiquement expliqué, voire justifié, le clivage mère / putain qui pousse certains hommes, sans doute nombreux, à dissocier aussi dans leur vie réelle les deux courants sous des modalités diverses :

    - celle de l'épouse et de la maïtresse clandestine, maïtresse qui attendra très longtemps de pouvoir prendre la place de l'épouse, alors que précisément si la situation est structurée sur ce mode, c'est pour dissocier ces deux figures et pas seulement pour varier les plaisirs.

    - Il y a aussi la figure de l'épouse et du recours aux prostituées ;

    - de l'épouse et des aventures multiples et répétitives annexes ;

    - voire dans une version plus moderne, de l'épouse et de l'utilisation d'Internet.

    Tout ceci venant une fois encore reproduire la même configuration : d'un côté, l'épouse respectable, idéalisée et éventuellement mère des enfants ; de l'autre, les femmes objet de désir". .../...

    La carte du tendre hyperclivée fournit une explication sur les déterminants masqués de "l'amour vrai". En fait La carte du tendre hyperclivée explique le caractère idéologique de l'amour désincarné de certains philosophes ou psychologues.

    Reprenons le propos de Danille BASTIEN : "Chez certains hommes d'ailleurs, dans une version encore plus radicale, c'est la dissociation obligatoire qui s'imposera : ils ne pourront aimer que celles qu'il ne désirent pas et ne désirer que celles qu'ils n'aiment pas. Dans une version plus symptomatique, des difficultés sexuelles, voire l'impuissance, apparaîtront dans un des couples, alors que pourra advenir une puissance sexuelle avec l'autre. On comprend dès à présent à quel point l'harmonie conjugale est si peu souvent aisée.

    CHEZ LES FEMMES par contre, c'est le clivage, tel qu'il a été conceptualisé par Freud et puis par Lacan, qui sera insupportable. Il le sera parce que l'amour seul pourra être le voile imaginaire qui permet de masquer la crudité du désir. Voilà aussi pourquoi la passion amoureuse est tellement valorisée et recherchée par les femmes.

    Celle-ci constituerait une sorte de preuve majeure, pour la femme, qu'elle est non seulement aimée et désirée, mais bien plus, aimée au point de devenir la seule et l'unique qui puisse susciter la force de ce sentiment. Ce qui est en effet très loin, voire opposé à l'objectalisation précédemment décrite, où elle ne serait "qu'un petit bout de corps". L'un - l'amour ou la passion -, proposent ces auteurs, permettant l'autre - le fait d'être objectalisée."

     


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