• LA GAUCHE ROMANTIQUE : POUR UN AUTRE MONDE ?

    LA GAUCHE ROMANTIQUE : POUR UN AUTRE MONDE ?



    On parle beaucoup de la gauche « installée », froide, sérieuse, celle qui a « mis de l'au dans son vin » et qui s'est adapté aux contraintes du marché. Mais on évoque peu la gauche romantique. La terminologie recouvre il est vrai un spectre assez large. Ce qui oblige à des distinctions. Auparavant définissons le romantisme politique.



    I - QU'EST-CE QUE LE ROMANTISME ?

    Je cite un passage du livre « Révolte et mélancolie » (1) : Dans Pour une sociologie du roman Lucien Goldmann conçoit celui-ci comme mettant en scène le conflit entre la société bourgeoise et certaines valeurs humaines ; le genre romanesque exprimerait ainsi les aspirations de certains individus « problématiques », motivés par des valeurs qualitatives opposées au règne de la seule « valeur d'échange ». Mais il s'agit d'une vision du monde qui ne se limite ni à la littérature ni aux arts.

    Au sens large, « le romantisme représente une critique de la modernité, c'est-à-dire de la civilisation capitaliste, au nom de valeurs et d'idéaux du passé (pré-capitaliste, pré-moderne) » (p 31). Les principales caractéristiques de la modernité inséparable du capitalisme sont l'esprit de calcul, le désenchantement du monde, la rationalité instrumentale, la domination bureaucratique, la réification de l'humain...

    Le romantisme porte-il un réel anticapitalisme, un anticapitalisme conscient ? Pas toujours. La critique romantique prend des formes très diverses. De même la vision romantique n'est pas toujours empreinte de mélancolie et de douleur dans ses convictions d'une société aliénée. Pas plus que le romantisme porte nécessairement son regard avec nostalgie sur le passé et pas vers l'avenir.



    II – LE ROMANTISME, DE MOUVANCE A PARTI ANTICAPITALISTE


    - Le romantisme comme mouvance d'altermondialisation.

    Il existe bien un courant contestataire « hyper romantique » et mélancolique qui a pris la suite des hyppies des années 65 qui s'est tourné vers la terre, l'artisanat et l'écologie quand d'autres choisissaient volontairement d'entrer dans les usines. On peut retrouver aujourd'hui, sans qu'il s'agisse des mêmes, ces « contestataires romantiques » parmi les "décroissants", parmi les « anti-pub », ou parmi les partisans de la simplicité volontaire. Ils préconisent souvent la révolution personnelle, le changement des comportements individuels et se désintéressent des stratégies collectives et des programmes politiques. Ils se reconnaissent plus dans l'altermondialisation (processus concrets pour un monde meilleur ou pour d'autres mondes aux marges du système) mais pas dans l'altermondialisme (pour un autre monde radicalement différent). Pas tous cependant. Le mouvement connaît des sensibilités qui combinent transformation personnelle et transformations collectives. Ces mouvances, qui ne sont pas nécessairement affilié à des organisations anarchistes ou libertaires, sont bien souvent opposés à la gauche marxiste laquelle n'est pourtant pas monolithique.

    - Le marxisme divisé entre un « courant froid » et un « courant chaud ».

    Cette division est apparue face aux théories d'Althusser avec notamment l'ouvrage collectif « Contre Althusser » (réédité depuis). Non disent-ils l'histoire n'est pas « un «procès sans sujet ». A l'époque ou le marxisme subissait l'influence du structuralisme la gauche marxiste critique du stalinisme soulignait qu'à trop donner de force aux structures, on oubliait « la lutte des classes », l'intervention des masses face aux attaques du capital. Ce rejet du marxisme froid d'Althusser ne signifiait pas fuite de l'abstraction et de la théorie. Il n'y a qu'à lire les ouvrages de l'époque de Jean-Marie BROHM qui a marié Marx à Freud, un Freud revu et corrigé par Marcuse. Un « monstre épistémologique » certes mais quelle richesse d'analyse !

    - Derniers avatars de l'histoire : « marxisme de gouvernement » et « marxisme de lutte » .

    La gauche marxiste se subdivise toujours en un « courant froid » et un « courant chaud ». La distinction perdure toujours à mon sens dans la distinction entre « marxiste de gouvernement » et « marxiste de lutte » : une distinction très relative qui oppose encore le PC et la LCR. Il s'agit d'une distinction assez peu dialectique donc à prendre avec des pincettes mais qui possède sa vérité, une vérité qui est à l'origine de la mise au pluriel du mot « gauche ».

    Le PCF, parti « marxiste de gouvernement » et la LCR parti « marxiste de lutte », cela se voit même dans la composition sociologique de ces deux organisations : l'une ayant plus de militants âgés, installés dans les structures sociales spécialisées dans les conflits catégoriels ou les affrontements de classe comme le sont les syndicats avec cette culture syndicale certes critique mais surtout concrète ; l'autre forte d'une jeunesse disposant d'un idéal poussant plus fortement à la constestation radicale avec un idéal lié à une culture politique conséquente et surprenante. Ce substrat intellectuel des JCR intègre à Marx les apports de Rosa Luxembourg, de Gyogy Lukacs, de Che Guevara (mais sans doute beaucoup moins Gramsci).

    Cette distinction est le produit de l'histoire qui a opposé le trotskysme au stalinisme. Elle en voie de résolution. Un des enjeux serait de tenir ensemble gouverner/lutter. Il faut pour cela renverser le "baiser qui tue de F MITTERRAND" au PCF et à toute la gauche.

    Christian DELARUE

    Révolte et mélancolie : le romantisme à contre-courant de la modernité par Michael LOWY et Robert SAYRE - Payot 1992 ; Le « concept de romantisme » y est étudié en page 25.


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